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Une toile… et de multiples procédés

L'indiennage consistait à apposer durablement des motifs colorés à des toiles « crues » . Il nécessitait nombre de produits chimique et organiques pour l'apprêt des toiles et leur coloration permanente, importés souvent de fort loin. En 1850, les « drogues » utilisées par la fabrique de Vauvillers (maison Bovet & Cie) étaient au nombre de 70 (!), parmi lesquelles : amidon, chaux, goudron, gomme arabique, mercure, sels, vitriol etc ; les matières tinctoriales étaient au nombre de 30 et comptaient : bleu d'outremer, indigo de St-Domingue ou du Guatemala (bleu), cachou d'Inde (brun-vert), cochenille surfine (rouge carmin), bois de Campêche (Mexique), d'Inde, de Lima (rouge), garances de Provence, d'Alsace, de Hollande (rouge), quercitron de Philadelphie (jaune) etc.

 

Les besoins de l'indiennage comptaient de grandes quantités d'eau et de vastes espaces ouverts pour les étapes principales de la manufacture, qui exigeaient de généreux lavages et des séchages efficaces. Etaient également nécessaires une main d'œuvre abondante et des moyens de communication aisés (permettant les transferts de biens finis comme d'intrants). Ces besoins expliquent la préférence vite affichée par les indienneurs pour les rives du lac de Neuchâtel et de l'Areuse, qui offraient les avantages requis. Jean Labran fut le premier à ouvrir une fabrique dans le bas du canton, à Cortaillod, au lieu dit la Poissine, en 1727.

 

Avant l'introduction, dès 1810, de l'impression au rouleau, on imprimait les toiles au moyen de planches gravées. Les imprimeurs appliquaient les planches enduites de teinture sur les toiles, assurant une répartition égale de la couleur par deux coups de maillet. Leur travail était complété par des « rentreuses » et des « pinceleuses » qui parachevaient le coloriage des toiles. De nombreux ouvriers – assistés parfois de leurs enfants – s'occupaient d'autres tâches liées au lavage, au blanchissage, au séchage etc. des toiles. Il fallait deux mois pour produire une indienne.

 

Cette concentration de travailleurs – jusqu'à plusieurs centaines d'ouvriers dans le cas des principales fabriques – a correspondu à la première apparition dans la pays d'ouvriers, astreints à un style, un rythme et une discipline de production préfigurant les entreprises industrielles du XIXe siècle, en contraste flagrant avec le substrat économique agricole et la tradition artisanale.

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