Eugène Victor Félix est né le 7 novembre 1824 à Neuchâtel, quatrième enfant de Claude Abram et de Marie-Louise née Bovet, alors âgés respectivement de 51 et 39 ans.
En 1842, alors qu'il n'a pas 18 ans, sa mère décède des suites d'un accident de la circulation, le laissant seul avec un père d'âge fort avancé (70 ans) qu'il vouvoie. Après ses études gymnasiales, Félix quitte avec soulagement Neuchâtel pour Berlin, où il entame des études de droit puis se rend à l'appel de la théologie, avant de se consacrer à l'étude des langues bibliques – hébreu, chaldéen, syriaque et samaritain – qu'il considère « indispensables pour l'étude de l'Ancien Testament »; quant au cours de Fundamentaltheologie du professeur Nitzsch (sic!), il le suit « un peu pro formâ afin qu'il ne puisse pas être dit que j'ai été à Berlin sans avoir entendu Nitzsch ». A son retour, Félix devient bibliothécaire de la ville de Neuchâtel, poste qu'il occupera jusqu'en 1858. Il passe aussi avec succès les examens de consécration mais refuse de se faire consacrer, estimant manquer de « cette autorité qui vient de la certitude ». Entre autres occupations, Félix se passionne pour les littératures étrangères qu'il lit dans le texte, apprenant l'anglais et l'italien en plus de l'allemand et des langues mortes, latin, grec, hébreu (qu'il enseigne).
Au décès, début 1857, de son père – qu'il a veillé en apprenant le sanscrit – Félix s'enfuit de Neuchâtel pour un périple en Terre Sainte. Embarquant à Marseille sur un steamer, Félix en débarque à Alexandrie. Après deux semaines en Egypte, Félix décrit les affres du touriste qu'il est: « Bakchiche » est le premier mot d'arabe que l'on apprenne en voyageant mais ce seul mot vous coûte plus cher que tout le dictionnaire de Freytag ». De Jaffa (actuelle Tel Aviv) il se rend à cheval à Jérusalem. Haut-lieu pour des milliers de pèlerins, Jérusalem compte alors quatre portes, deux auberges et 15'000 habitants. Félix poursuit son périple accompagné d'un guide et de trois chevaux – ainsi que, pour un temps, d'un bachi bouzouk armé, attaché à sa sécurité. Ce périple le mènera à Naplouse, Nazareth, Tibériade, Tyr et enfin Beyrouth. Il lui fera surtout goûter la vie des autochtones, dont il apprécie plus les galettes et le lait caillé en pleine nuit (Ramadan oblige) que les puces qui l'empêchent de dormir. Remarquable d'adaptation, il prend un réel plaisir à cette vie à la dure, le jour dans la poussière, la nuit chez l'habitant, se contentant d'oranges et de café, comme de la fumée d'une chibouque. De Beyrouth, Félix s'embarque pour un nouveau périple à travers « le pays d'Homère, la terre sainte de la Poésie ».
Peu après son retour de voyage, en juin 1859, Félix épouse Hélène, fille de son cousin Philippe et de sa femme Bertha à qui il est très lié. Au retour de leur voyage de noce, le couple décide de s'adonner à la direction de l'Asile de Grandchamp fondé par Bertha et son mari et destiné à l'éducation d'orphelins.
La famille s'agrandit avec la naissance d'un fils Jean (1860-1913), bien avant Isaac (né et mort en 1874) puis Pierre (1878-1965). A Grandchamp, Félix et Hélène sauront allier une vie de dévouement à la cause des œuvres familiales – Asile-hôpital, Etablissement-orphelinat, puis plusieurs autres institutions – à la vie mondaine ou du moins intellectuelle. Félix bâtira une bibliothèque de 8'000 volumes dans laquelle il recevra maints penseurs du moment, parmi lesquels son camarade d'études H.F. Amiel. Dès 1860, Félix enseignera la littérature française puis l'hébreu et l'Ancien Testament à l'Académie de Neuchâtel. Félix écrira et éditera aussi plusieurs ouvrages (voir ci-dessous). Son mariage et son établissement à Grandchamp n'empêcheront pas Félix de poursuivre sa passion des voyages, en France, Allemagne, Angleterre et même jusqu'aux Etats-Unis (invité à des conférences évangéliques, il tentera de « fumer un calumet avec des Peaux-Rouges » …). C'est cependant l'Italie qui a la préférence de Félix et où il passe de nombreux hivers avec sa famille, avouant un faible pour Pise. Les forces déclinantes de Félix ne l'empêcheront pas de rendre ses fils fort érudits. Ses derniers combats publics seront pour l'Armée du Salut, interdite en Suisse et dont il hébergera, en 1894, une séance qui sera interrompue par l'arrivée de la police!
Félix s'éteindra le 4 septembre 1903 après sept années passées au lit, à l'âge de 79 ans. La rue menant d'Areuse à Grandchamp porte son nom.
Bibliographie de Félix Bovet:
· Armorial neuchâtelois
· Voyage en Terre Sainte, 1861, 7 éditions, 4 traductions
· Le Comte de Zinzendorf, 1865 (2 vol.)
· Histoire du Psautier des Eglises réformées, 1872
· Les Psaumes de Mahaloth, 1889
· Lettres de jeunesse, 1906
· Pensées, 1909
Lettres de Grandchamp et d'ailleurs, 1934
Félix (1824-1903)
Félix (1824 - 1903)